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SOUVIENS-TOI DES ABEILLES
FRAGILITÉ DE LA NATURE ET DE LA CONDITION HUMAINE
Texte: Laurence Hainault Aggeler
Le livre est sorti chez Gallimard en mai 2024, collection blanche.
Zineb Mekouar est née en 1991 à Casablanca et vit à Paris depuis 2009. Son dernier roman, «Souviens-toi des abeilles», exprime avec la simplicité d’un souffle poétique retenu l’existence laborieuse des apiculteurs du Haut Atlas marocain. Inspirée par le village d'Inzerki et son extraordinaire rucher collectif, l’écrivaine noue la dramatique d’une légende à celle d’une époque promise à la destruction graduelle.
LA DAMNATION INÉLUCTABLE
Quand Aïcha voit son bébé suffoquer, elle enfreint les lois millénaires et s’empare du miel interdit pour tenter de le sauver. Sur elles tomberont l’opprobre du village et la damnation inéluctable qui mène droit à la folie. Inconsolable, elle continue de chanter la ritournelle obsessionnelle de sa démence et de sa faute. Simplement pour résister envers et contre toute logique.
UNE CULTURE DE TRANSMISSION
Son fils de 10 ans continue d’espérer encore et encore. Chaque matin, Amir gravit la colline avec elle pour se réfugier dans la beauté des terres rouges, ocre et blanches, dans le parfum des arbres. Ignorant la cause d’un drame qui leur vaut le rejet de tous, il néglige la malédiction. Malgré cette chaleur qui empêche l’air d’entrer dans les poumons, il suit son grand-père et prend soin des ruches et de leurs habitantes. Chaque geste marque le respect d’une culture berbère de la transmission. Quand la terre s’ébranle, beaucoup d’abeilles cessent de butiner par manque de fleurs sur cette terre asséchée, mais le cours des choses refuse pourtant de s’interrompre.
UN ROMAN MÉTAPHORIQUE
L’eau ne reviendra sans doute que provisoirement, juste avant la fin d’un monde, mais les villageois continuent à y croire. Sans jamais céder à la tristesse, ce récit pose les émotions infimes, une à une, avec un sens précis de l’opportunité. En fin de compte, Zineb Mekouar évoque la fragilité de la condition humaine et notre entêtement irrationnel à survivre.
L.H.A 08/2024
Publié le 27 août 2024