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NAÎTRE SVETLANA STALINE

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SVETLANA STALIN 09En famillejonone2 280Une femme qui abandonne une position sociale enviée pour se jeter dans l'inconnu. jonone3 280Des animations inspirées du futurisme russe et vraiment magnifiques.
SVETLANA STALIN 01«20 lettres à un ami»: Ses mémoires lui permettent l'indépendance financière, à son arrivée aux États-Unis. Les Soviétiques s'inquiétent de cette publication.
(Original Caption) 12/31/1967-New York, NY- Svetlana Alliluyeva, daughter of the late Russian dictator Josef Stalin, answers newsmen's questions at a press conference April 26, 1967.


TOUJOURS EN MOUVEMENT, IMPRÉVISIBLE, AU COEUR DES ENJEUX GÉOPOLITIQUES

Questions: Sandrine Charlot Zinsli


Le film sort en Suisse alémanique le 21 novembre 2024

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Gabriel Tejedor est réalisateur et journaliste. Il s'intéresse aux utopies et au rapport des gens à l'autorité en ex-URSS. Après KOMBINAT (2022) salué par la presse, NAÎTRE SVETLANA STALINE est son quatrième long métrage documentaire.

A Zurich au cinéma Frame, les 23 et 24 à 11h et le samedi 30 novembre et le dimanche 1er décembre à 11h.


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Pourquoi s'intéresser à Svetlana Staline aujourd'hui?

Gabriel Téjédor (GT): Car les archives fédérales récemment ouvertes ont permis à des chercheurs de se plonger sur cette partie essentielle de la vie de la fille de Joseph Staline. Cela a notamment permis la sortie d'un livre («Opération Svetlana» de JC Emmenegger) richement documenté. Quand l'auteur m'a proposé de faire de cette histoire un film, j'ai rapidement accepté. D'imaginer la scène où Svetlana toque à l'ambassade US et annonce à l'employé de l'ambassade qu'elle demande l'asile, elle la fille de Staline, m'a fait rêver. Cette scène est tellement improbable. Même dans un film de fiction, on n'oserait pas écrire une scène pareille. Ensuite, en me plongeant dans cette histoire, j'ai aussi découvert une part de mon pays que je ne connaissais pas: l'anticommunisme des autorités, leur naïveté, l'alignement sur les USA... Et le désir de liberté de Svetlana m'a également beaucoup touché. Elle est une vraie rebelle qui s'est affranchie de toutes les convenances, abandonnant son pays, ses enfants et une position sociale enviée pour se jeter dans l'inconnu.

Pour dresser son portrait, vous avez fait appel à des historien·nes,
des témoins et des personnes qui l'ont rencontrée, des archives mais
aussi des extraits de ses écrits illustrés par de magnifiques
animations. Comment avez-vous tissé cette trame narrative (vraiment
réussie) et comment sont nées ces animations?  

GT: Durant ses 40 premières années en URSS, Svetlana vivait en partie cachée pour raisons d'Etat. Beaucoup de monde, notamment à l'Ouest, ignorait que Staline avait une fille. De cette période, il n'existe donc quasiment pas d'archives filmées et assez peu de photos. Et pourtant c'est durant cette période que les événements les plus importants de sa vie se sont déroulés. Alors comment les raconter? Je me suis donc tourné vers l'animation pour illustrer ces événements: sa vie d'enfant avec son papa, ses premiers amours, sa fuite d'URSS... Les 40 années suivantes, Svetlana est une star planétaire. Les archives la concernant sont presque infinies. Svetlana joue avec les médias, s'accommodant parfois avec la réalité. Les animations ont également permis de donner une unité visuelle au film. Pour le style des animations, j'ai travaillé avec le studio berlinois Baguette magique. Nous nous sommes inspirés  du futurisme russe, des aplats de couleurs primaires, des collages...

Svetlana Staline passe quelques semaines en Suisse en 1967 avant que sa demande d'asile ne soit acceptée par les États-Unis. On la voit dans des couvents du canton de Fribourg ou encore un hôtel de l'Oberland bernois. Aurait-elle souhaité rester ou revenir en Suisse? Est-ce qu'il en a été question?

GT: À son arrivée dans notre pays elle n'a guère apprécié les montagnes. Elles lui rappelaient celles du Caucase. Donc son père. Puis, elle a fait connaisance avec des habitants et de habitantes et son point de vue s'est adouci. Ensuite, une fois qu'elle s'est installée aux USA, Svetlana a déchanté. Elle a découvert une société très conservatrice où les femmes restaient au foyer. Elle a alors cherché à fuir à nouveau. Elle a écrit à des connaissances en Suisse et aux autorités pour voir s'il serait possible à elle et sa fille de venir s'installer en Suisse. Notamment afin de scolariser sa fille. Mais les autorités n'étaient guère emballées. Avec le temps, le sort de Svetlana n'a plus constitué un enjeu géopolitique et les autorités le lui ont bien fait comprendre.

Comment avez-vous découvert le film tourné par un journaliste français lors du séjour de Svetlana en Suisse?

GT: C'est une connaissance qui me l'a transmis. Il appartenait à une famille chez qui Svetlana avait passé quelques jours durant son séjour en Suisse. Cete famille prefère rester anonyme.

Svetlana Staline cherchait la liberté. Y-est-elle parvenue?

GT: Difficile à dire. Elle n'a eu de cesse de bouger, de se chercher spirituellement, dans sa vie amoureuse.... J'ai rencontré des personnes qui l'ont bien connue. Ils la décrivaient comme toujours en mouvement, imprévisible mais aussi extrêmement charmante.

Publié le 13 novembre 2024